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Étape Explorer le manuel numérique

Préparé par Laurence Lachapelle-Bégin, conseillère pédagogique, Vitrine technologie-éducation avec la collaboration de Marc-Antoine Parent, analyste, Groupe de travail québécois sur les normes et standards TI pour l’apprentissage, l’éducation et la […]

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Préparé par Laurence Lachapelle-Bégin, conseillère pédagogique, Vitrine technologie-éducation avec la collaboration de Marc-Antoine Parent, analyste, Groupe de travail québécois sur les normes et standards TI pour l’apprentissage, l’éducation et la formation (GTN-Québec)

Compte tenu de l’usage croissant des dispositifs mobiles en éducation et de la popularité de l’apprentissage à distance, la numérisation du matériel pédagogique devient un impératif. De plus en plus, les manuels numériques complètent ou remplacent les manuels sur papier ou les notes des enseignants, et la tendance ne montre aucun signe de ralentissement. En raison de leur coût et des compétences techniques nécessaires, la création de manuels numériques a longtemps été la chasse gardée des maisons d’édition. Toutefois, de nouvelles ressources et de nouveaux outils de développement mettent maintenant l’édition numérique à la portée des enseignants.

Définition du manuel numérique : fonctions et formats

Derrière l’image couverture d’un manuel numérique, le lecteur trouve habituellement une table des matières, du texte accompagné d’illustrations, des éléments multimédias et des hyperliens. L’interface du manuel propose généralement des fonctions qui permettent au lecteur d’effectuer les tâches fondamentales héritées de l’utilisation de manuels sur papier, essentiellement la création de signets, la recherche, la mise en évidence et l’annotation. Dans un contexte pédagogique, un manuel numérique devrait au moins inclure des fonctions de gestion des notes et des signets de même qu’un dictionnaire intégré. Enfin, une fonction essentielle des manuels numériques de nos jours est l’adaptabilité à la plateforme, au sens où leur contenu doit être utilisable non seulement sur un ordinateur, mais aussi sur les dispositifs mobiles tels que les liseuses (dispositifs conçus spécialement pour lire des livres numériques), les téléphones intelligents et les tablettes électroniques.

Voici les formats de manuels numériques les plus populaires à l’heure actuelle :

  • Format PDF (Portable Document Format)

Pendant de nombreuses années, le format PDF a été privilégié pour les documents numériques en raison de ses qualités esthétiques et de son optimisation pour l’impression. Les fichiers PDF sont faciles à produire, et les fonctions d’annotation et de mise en évidence s’améliorent rapidement, notamment dans les applications mobiles. Par contre, comme les fichiers PDF sont en réalité des images, ils ne s’adaptent pas facilement sur le plan de la mise en page, ce qui peut être un problème pour les manuels destinés à être lus sur des dispositifs variés dont la taille d’écran diffère. De plus, le transfert d’un fichier PDF sur un dispositif mobile désactive parfois les hyperliens vers les sites Web externes. Enfin, les recherches textuelles dans un fichier PDF sont limitées : impossible de faire une recherche sur le texte contenu dans des graphiques ou des formules mathématiques, traités comme des images au sein du fichier; il s’agit là d’une faiblesse pour les manuels de cours en sciences, en technologie, en ingénierie et en mathématiques.

  • Manuels en ligne

Ce format est très en vogue chez les éditeurs de manuels de cours et dans les universités américaines. Par exemple, l’Université de l’Indiana offre au corps professoral et aux étudiants l’outil en ligne Courseload ainsi que du soutien bien documenté dans le cadre de son projet de manuels numériques eTexts. D’autres universités offrent les services de Flat World Knowledge [http://www.flatworldknowledge.com/], éditeur de manuels en ligne. Pearson, éditeur de manuels d’enseignement supérieur, propose également son propre modèle en ligne : eText.

Les manuels en ligne sont attrayants parce qu’ils offrent des fonctions de partage et de collaboration ainsi que des expériences riches en multimédia, habituellement inexistantes dans les manuels qui se contentent d’être des répliques numériques. Certains manuels en ligne comportent des fonctions permettant d’analyser les progrès des étudiants. Autre avantage des manuels en ligne : on peut en tout temps les mettre à jour simultanément pour tous les utilisateurs; tout le monde utilise toujours la version la plus récente. Par contre, les manuels de ces fournisseurs n’adaptent pas non plus leur mise en page à la plateforme de livraison et souffrent donc du même problème que les PDF.

En revanche, les manuels en ligne élaborés par les éditeurs ont un format propriétaire. Dans bien des cas, leur coût n’est pas tellement inférieur à celui des manuels sur papier, et la gestion des droits peut être très stricte : les comptes des utilisateurs expirent normalement au bout d’un certain temps. Par conséquent, il est impossible de revendre les manuels ou de les passer à quelqu’un d’autre à la fin du semestre. En outre, bon nombre d’étudiants aiment garder leurs manuels pour référence ultérieure et pour les annotations qu’ils y ont ajoutées, ce qui n’est pas possible en vertu de plusieurs programmes actuels d’achat ou de location de manuels en ligne. Le manque d’interopérabilité est un autre problème crucial : impossible de transférer les données d’un manuel à un autre ni d’importer ou d’exporter le manuel de cours dans un autre format. Enfin, les manuels en ligne ne s’utilisent pas hors ligne, ce qui pose un problème aux institutions ayant un accès limité à Internet dans les salles de classe.

  • Format EPUB

Le format EPUB est une norme internationale pour les livres numériques développée par l’International Digital Publishing Forum (IDPF). La plupart des documents et des outils de développement EPUB actuels sont fondés sur la deuxième version de la norme, EPUB2, approuvée en 2007. La troisième version, EPUB3, a été lancée en octobre 2011 et contient des fonctions qui améliorent beaucoup l’intégration des médias, l’interactivité et l’accessibilité, ce qui en fait un format idéal non seulement pour les manuels numériques, mais aussi pour les magazines et les revues scientifiques. Toutefois, en ce moment, peu d’outils facilitent la lecture et la création de fichiers EPUB3 : en effet, une année ne laisse guère de temps aux développeurs pour intégrer une nouvelle norme technique.

Étant une norme internationale, le format EPUB est reconnu par un grand nombre de liseuses, à l’exception notoire du populaire dispositif Kindle d’Amazon, qui ne lit que ses propres formats : TPZ et AZW (en plus de PDF.) On peut convertir un fichier EPUB dans un format supporté par Kindle avec l’outil adéquat (comme l’application ouverte gratuite Calibre [http://calibre-ebook.com/]), sauf si le fichier est protégé par une technologie de gestion des droits numériques (GDN). Les technologies GDN « verrouillent » le contenu numérique; de nombreux fournisseurs de contenu comme Adobe, Apple, Amazon, Sony, etc., les emploient pour empêcher certaines utilisations de leurs produits, et leur suppression est généralement illégale. Pour sa part, Apple a son propre format (iBooks), dérivé du format EPUB, mais illisible sur un dispositif autre qu’Apple.

Quelques applications permettent de lire un fichier EPUB2 sur un ordinateur de bureau ou un portable. Les plus répandues sont Adobe Digital Editions (pour les fichiers protégés par la technologie de gestion des droits numériques d’Adobe) et Calibre (pour les fichiers non protégés). Des modules d’extension permettent par ailleurs de lire des fichiers EPUB2 sur des navigateurs Web, notamment Readium pour Google Chrome. Readium s’avère le seul outil capable de lire aussi, pour l’instant, des fichiers de la plus récente version, EPUB3.

La plupart des tablettes électroniques et des téléphones intelligents sont dotés d’une application de lecture EPUB; par contre, les utilisateurs des dispositifs mobiles Apple doivent installer l’application iBooks (qui est inutilisable sur les ordinateurs Mac) ou une autre application de liseuse comme Bluefire Reader ou Stanza.

Lorsqu’un manuel numérique est censé être polyvalent, interactif et accessible sans connexion à Internet, il est tout indiqué de l’éditer comme un fichier EPUB. Ce format est normalisé à l’échelle internationale et peut être lu sur presque tous les dispositifs. Sur le plan technique, il est assez simple pour que la création et la conversion de manuels soient relativement faciles. Et même si un manuel en format EPUB2 n’est pas aussi interactif ou esthétique qu’une publication en ligne, il peut être utilisé hors ligne, ce qui lui confère un avantage important.

Production d’un manuel numérique

Comme pour la plupart du matériel pédagogique, la création d’un manuel numérique exige du temps, des ressources, des compétences et du soutien. C’est pourquoi tout projet devrait commencer par une analyse des besoins afin de déterminer si le recours à un manuel numérique est clairement avantageux pour atteindre les objectifs pédagogiques. Si c’est le cas, de nombreuses ressources gratuites ou ouvertes sont disponibles pour le concevoir et le développer. Dans cette section, nous présentons des banques de ressources d’enseignement et d’apprentissage offrant des manuels numériques ouverts qui peuvent être réutilisés ou recombinés; nous proposons également quelques outils d’édition de manuels en format EPUB, format ouvert et normalisé à l’échelle internationale créé spécifiquement pour les livres numériques.

Réutilisation de matériel pédagogique existant

Il ne faut pas nécessairement créer un manuel numérique à partir du néant. Depuis maintenant de nombreuses années, les participants au mouvement d’éducation ouverte (lequel prône notamment que la connaissance doit être utilisable et réutilisable gratuitement) ont produit des milliers de ressources d’enseignement ouvertes (REO) disponibles sur Internet, y compris des manuels.

Dans les banques de REO, les manuels sont accessibles par chapitre, ce qui facilite la recombinaison et la personnalisation. Ainsi, la fondation CK-12 (CK-12 Foundation) produit des manuels en ligne gratuits et ouverts, en langue anglaise, pour les cours de sciences, de technologie, d’ingénierie et de mathématiques. Ces manuels peuvent être lus en ligne ou téléchargés un chapitre à la fois en format PDF, EPUB et dans un format compatible avec la liseuse Kindle. La banque de ressources d’enseignement et d’apprentissage Connexions est un système de gestion de contenu dans lequel se trouvent des manuels (majoritairement en langue anglaise) à accès ouvert, permettant de construire des modules de cours à afficher en ligne ou à télécharger sous forme de fichiers PDF ou EPUB.

Un autre modèle de création de manuels numériques personnalisés fondés sur les REO a été lancé par Boundless. Cette petite entreprise offre des solutions en ligne gratuites pour remplacer des manuels universitaires bien connus en combinant des ressources ouvertes correspondant au contenu d’origine de ces manuels. Presque tout de suite après la création de cette entreprise en avril 2012, un groupe de trois grands éditeurs a intenté une poursuite judiciaire, alléguant que le concept de Boundless était en réalité du vol intellectuel. Ce litige met en lumière un malaise croissant dans le monde de l’enseignement : la connaissance qui relevait autrefois essentiellement des professeurs et des éditeurs de manuels est maintenant accessible à tous sur Internet, gratuitement. Les établissements d’enseignement et les étudiants continueront-ils d’acheter des manuels coûteux si les enseignants peuvent produire du matériel pédagogique adapté à leurs besoins, pourvu qu’ils disposent du temps et des ressources adéquates? De fait, les outils de développement de livres numériques se multiplient pour différents niveaux de compétences en informatique. Nous en présentons quelques-uns ici, en privilégiant ceux qui permettent de produire des documents dans le format ouvert EPUB.

Création d’un document EPUB

Pour produire un manuel numérique en format EPUB, il faut partir de documents structurés. Si vous travaillez avec un traitement de texte, vous devez utiliser les styles pour distinguer le corps du texte des titres, des images, des citations, des références, etc., dans votre document. Ensuite, vous pourrez éditer votre manuel en format EPUB à l’aide d’un certain nombre d’applications gratuites.

Une des applications les plus conviviales est le traitement de texte ouvert Writer d’OpenOffice qui permet d’éditer des fichiers EPUB ayant l’extension gratuite Writer2ePub ou, pour de meilleurs résultats, l’extension (commerciale) odftoepub. Ces extensions ne sont pas des convertisseurs de fichier; elles créent un nouveau fichier EPUB dans votre ordinateur au même endroit que le fichier d’origine. Le document d’origine peut être rédigé directement dans Writer ou peut être un document existant rédigé dans Microsoft Office Word ou Google Documents (à condition qu’il soit structuré avec des styles). Dans ce cas, il faut l’enregistrer comme un fichier OpenDocument (.odt), l’ouvrir dans Writer et l’éditer avec Writer2ePub ou odftoepub.

L’éditeur de livres numériques ouverts Sigil est un autre logiciel intéressant qui permet de convertir des fichiers texte et HTML en format EPUB et de créer un manuel numérique à partir de rien.

La conversion de documents PDF au format EPUB peut s’effectuer avec le convertisseur de fichier Calibre, mais les résultats peuvent varier selon le formatage et la mise en page du fichier d’origine. Si vous êtes à l’aise avec les outils à ligne de commande, vous pouvez convertir les fichiers avec Pandoc. Si vous êtes familier avec l’introduction de balises de type HTML, vous pouvez aussi utiliser DocBook , langage sémantique qui permet de créer du contenu dans un format neutre, hautement structuré, pour ensuite l’éditer dans divers formats (y compris le format EPUB), sans modifier le fichier source. Les documents DocBook peuvent être édités directement en XML avec un éditeur de code ou il est possible d’employer un outil spécialisé d’édition XML comme oXygen.

Les propriétaires de iPad et d’ordinateurs Mac peuvent utiliser l’application gratuite iBooks Author pour concevoir des livres numériques, mais pour l’instant, ils ne peuvent pas exporter directement à partir de iBooks Author dans EPUB, ni importer des fichiers EPUB dans iBooks Author. La conversion d’un fichier iBook en un fichier EPUB n’est pas simple : une solution consiste à enregistrer le fichier en format PDF, puis à le convertir au format EPUB, mais la plupart des caractéristiques de conception propres à Apple se perdent en cours de route.

Quel que soit l’outil, il convient de commencer par un petit projet : faites des expériences avec un court segment et voyez si le logiciel correspond à vos besoins et à vos aptitudes techniques. Lancez sur Internet la recherche « Comment créer un livre numérique » pour avoir accès à des dizaines de tutoriels; indiquez dans votre recherche le logiciel et le format qui vous intéressent pour obtenir des résultats plus précis. Assurez-vous également de lire les conditions d’utilisation de l’outil afin d’éviter les difficultés ou les litiges.

La création d’un manuel numérique de haute qualité est une entreprise sérieuse, et le choix d’une stratégie de développement appropriée n’est que le point de départ. Avant même de rédiger la première ligne, il faut prendre des décisions au sujet du format du manuel, de son contenu, de la gestion des droits d’auteur et de l’accès. Si vous travaillez isolément, vous aurez besoin de planifier soigneusement votre échéancier en fonction de la date de distribution prévue. Compte tenu de tout cela, même si la production de manuels numériques est maintenant à la portée des enseignants, le jeu en vaut-il vraiment la chandelle?

L’avenir des manuels numériques

Les manuels numériques ont beaucoup de potentiel en éducation, car ils offrent la mobilité, l’interactivité, la diversité des méthodes de présentation du contenu (texte, audio, vidéo, animation…) et un jour prochain, la personnalisation pour un apprentissage individualisé. En outre, leurs possibilités peuvent se combiner avec celles d’un tableau blanc interactif en classe. Dans ce cas, pourquoi les manuels numériques n’ont-ils pas encore remplacé les manuels sur papier?

À l’instar d’autres technologies, la mise en œuvre des manuels numériques en éducation est limitée par des enjeux techniques et financiers. Le prix des tablettes électroniques et des liseuses, souvent mieux adaptées que les ordinateurs de bureau ou les portables à la lecture et à la manipulation d’ouvrages numériques, est encore élevé. Et même si bien des gens s’attendaient à ce que le coût des manuels numériques soit de loin inférieur à celui des manuels sur papier, il en diffère à peine dans certains cas. Cela est particulièrement vrai pour les marchés québécois et canadien.

Les ressources d’enseignement ouvertes (REO) pourraient offrir une solution à ce problème. Par exemple, au Canada, la Colombie-Britannique va offrir des manuels numériques ouverts aux étudiants universitaires de première et de deuxième année à partir de 2013. Aux États-Unis, la California State University a lancé une campagne appelée Affordable Learning Solutions Campaign pour permettre au corps professoral de fournir du contenu pédagogique de qualité à un prix abordable pour les étudiants, y compris des manuels numériques. Les professeurs et les étudiants collaborent également à la création de ressources maison gratuites, comme en témoigne le projet Cachalot à la Duke University en Caroline du Nord. Étant donné que l’utilisation de manuels numériques est l’une des principales raisons invoquées par les établissements d’enseignement pour mettre en œuvre des projets de tablettes électroniques ou de liseuses, l’offre de manuels gratuits et ouverts ajoute indéniablement de la valeur à l’achat d’un tel dispositif.

Pourtant, les tablettes ou les ressources gratuites ne semblent pas suffisantes pour intéresser les étudiants aux ouvrages numériques. En effet, les manuels numériques devront être plus que des copies numériques des manuels sur papier pour emporter leur adhésion : selon un rapport publié par le Book Industry Study Group en 2011, 75 % des étudiants préfèrent encore les manuels sur papier à leurs répliques numériques. Parmi les raisons expliquant ce manque d’enthousiasme, comme le coût et les problèmes de disponibilité, les étudiants ont mentionné qu’ils « attendent davantage » d’un manuel numérique : interactivité, connectivité, fonctions de partage… À la lumière de ces résultats, il semble qu’une expérience d’apprentissage enrichie par des choix de conception novateurs pourrait favoriser l’adoption des manuels numériques. Cela signifie qu’il faut exploiter les nouveaux formats et outils de développement au lieu de simplement produire des répliques numériques des manuels sur papier ou des notes de l’enseignant. Bientôt, les formats spécifiques aux livres numériques comme EPUB3 autoriseront plus d’interaction, de partage et d’accessibilité, en ligne et hors ligne. Il faudra encore quelques années pour résoudre les problèmes de normalisation et de convivialité, mais les enseignants qui commenceront dès maintenant à structurer et à éditer des documents numériques seront déjà à bord du train quand il prendra de la vitesse.

En conclusion, la tendance des manuels numériques est très vivante, même si elle ne fait pas l’objet d’une grande couverture médiatique pour l’instant. Partout dans le monde, des établissements d’enseignement expérimentent les manuels numériques, notamment en Corée du Sud où un programme national a été mis en œuvre en 2008 pour numériser tout le matériel pédagogique d’ici à 2015. Si ce programme est couronné de succès, combien de temps faudra-t-il pour que d’autres pays adoptent cette idée? Entretemps, plus les établissements d’enseignement passeront au monde numérique et plus les éditeurs de manuels développeront de nouveaux modèles de matériel pédagogique, plus les enseignants seront appelés à utiliser des manuels numériques qui répondent aux besoins d’interaction et de collaboration des étudiants, ou à y contribuer. Par conséquent, il serait pertinent pour eux de suivre l’évolution des outils et stratégies de développement et de s’y initier.

Des fascicules tirés de Wikipédia en un clin d’œil

Envie d’expérimenter rapidement l’utilisation d’un manuel numérique dans une classe? Wikipédia est une solution de rechange idéale, à mi-chemin entre des solutions commerciales et un cahier de notes de cours. L’option Créer un livre, dans le sous-menu Imprimer/Exporter dans la barre de gauche, permet de rassembler 12 articles (pages) de Wikipédia dans un livre numérique. Le bouton Démarrer le créateur de livre fait apparaître un ruban de création en haut de chaque page de Wikipédia, où on peut spécifier les pages à ajouter au livre en les visitant une par une. Ensuite, la fonction Afficher le livre dans le même ruban offre une section de téléchargement avec une option de téléchargement en format EPUB. Le manuel obtenu contient, entre autres, une section listant les sources et contributeurs de l’article ainsi que la source des images, licences et contributeurs. Il constitue donc une pratique exemplaire de citation de site Web. Il ne reste plus qu’à distribuer le manuel à vos étudiants qui pourront le consulter sur leur ordinateur, leur tablette ou leur téléphone intelligent.

Si vous hébergez votre propre Wiki pour vos étudiants avec un MediaWiki, vous pouvez obtenir la même fonctionnalité en installant l’extension mwlib, développée par PediaPress.

JavaScript  et les promesses de l’interactivité

Un grand nombre d’espoirs entourant le manuel numérique touchent l’interactivité. Celle-ci suscite des attentes très élevées du côté des enseignants et des apprenants qui souhaitent utiliser des questionnaires, des cartes interactives et des simulations.
En pratique, la réalité est tout autre. Il y a deux approches de base pour offrir de l’interactivité : des activités prédéfinies suivant un gabarit ou une plateforme de programmation générique. Vu l’impossibilité de prévoir toutes les applications, le consortium IDPF a préféré offrir une solution basée sur JavaScript, comme le Web. Or, des années d’expérience avec les pages malveillantes, qui essaient d’installer des programmes pour le vol d’informations personnelles ou pour attaquer d’autres ordinateurs montrent, bien les dangers inhérents à une plateforme de programmation complète. De plus, les sites peuvent êtres mis à jour instantanément, et les pages malveillantes doivent trouver une faille avant que l’utilisateur ait navigué jusqu’à la page suivante, alors que le livre demeure actif pendant des heures.

Ainsi, une plateforme générique pose des problèmes de sécurité plus importants que le Web, et les revendeurs ont généralement soit refusé d’implanter un engin JavaScript, soit ont considérablement limité sa portée.

Le cas Apple

Le cas d’Apple est révélateur. Son application iBooks pour iPad (et iPhone) est l’application mobile offrant la meilleure couverture des capacités JavaScript sur EPUB3 (en plus d’un minimum de robustesse à l’utilisation). Deux approches de sécurité sont possibles :
Pour les livres EPUB3, JavaScript peut avoir accès au livre et s’exécuter sur une longue période, mais il n’a aucun accès réseau ni la possibilité de faire du stockage local. (Ainsi, il serait impossible de créer une plateforme analytique basée sur cette technologie).
Pour les livres utilisant le format .ibooks, générés iBooks Author, les gadgets peuvent avoir accès au réseau ou au stockage local, mais le JavaScript ne peut fonctionner qu’à l’intérieur des gadgets et a donc une portée limitée dans le temps et sur l’étendue du livre. Ainsi, les gadgets logiciels (widgets) dans des pages différentes ne peuvent communiquer entre eux des informations sur l’apprentissage de l’apprenant.

Ajoutons à cela que le format .ibooks est non standard (bien que dérivé de EPUB3, il en diverge de façon significative). En outre, l’emploi de l’outil iBooks Author est encombré de l’obligation de ne pas le revendre ailleurs que sur l’Apple Store. Nous sommes loin de l’interopérabilité espérée.

Pour les plus aventureux, la chaîne DocBook

Les nombreux mécanismes logiciels permettant de convertir des documents vers EPUB sont confrontés à la complexité de formats de documents qui mêlent des aspects de présentation (par exemple : italique, taille des caractères, position d’un paragraphe) avec la structure conceptuelle du document (titres, abréviations, encadrés, etc.). Une solution consisterait à définir un format de document qui ne spécifierait que la structure conceptuelle, laissant la présentation de cette structure varier selon une politique de mise en page.
C’est ainsi que l’on peut décrire DocBook, un format de documents basé sur XML. DocBook permet de décrire un document en ce qui a trait à ses composants sémantiques, et une série ayant recours aux transformations de feuilles de style XSLT permettent de produire des versions en format HTML, PDF, OpenDocument, WordML, EPUB2 et EPUB3. À ce titre, DocBook fournit un excellent point de départ pour des documents pouvant être adaptés à l’évolution des standards.

Par ailleurs, comme DocBook est basé sur XML, on peut y inclure directement plusieurs vocabulaires XML spécialisés, tels SVG ou MathML, qui sont qui sont supportés par la norme par la norme EPUB3 et permettent respectivement l’inclusion de graphiques ou de formules. Ainsi, l’écriture de manuels en format DocBook permet une distribution riche sur une variété de plateformes. Toutefois, c’est une solution qui exige un degré de maîtrise technique important. Il est possible d’exporter un document OpenOffice en DocBook (version 4), mais les liens vers les images doivent être corrigés à la main, les formules mathématiques exportées séparément, etc.

Des outils spécialisés, tel oXygen Author, facilitent l’édition de documents basés sur des formats XML tel DocBook, ainsi que la conversion des documents DocBook (4 ou 5) en EPUB. Cependant, même avec ces outils, il faut compter acquérir une compréhension de base du format DocBook et, éventuellement, d’EPUB3 si on veut pouvoir manipuler le document existant pour y ajouter des fonctionnalités manquantes (par exemple, l’interactivité). Il s’agit donc d’une solution très polyvalente, employée par des maisons d’édition technique spécialisées (notamment, O’Reilly), mais exigeant encore un degré important de connaissances techniques.

 

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