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3 juillet 2013

Le portfolio numérique

Ce texte a initialement été publié par la Vitrine technologie-éducation sous licence CC BY-NC-SA 3.0, avant la création d’Éductive.

Ce dossier est issu d’un laboratoire offert par la Vitrine technologie-éducation en 2012-2013 aux enseignants qui souhaitaient explorer l’utilisation d’un portfolio numérique à des fins personnelles ou professionnelles, pour eux-mêmes ou avec les étudiants de leur classe. Une vingtaine de participants ont ainsi été accompagnés dans cette appropriation.

Ce laboratoire a été réalisé avec plusieurs organismes partenaires TIC du réseau collégial. Le portfolio SHERPA, développé par l’APOP, a été mis gratuitement à la disposition des participants par la corporation DECclic qui offrait un accès depuis son service d’hébergement Moodle. Profweb a recueilli les témoignages de plusieurs enseignants afin de constituer une source d’inspiration pour les participants.

Ce dossier s’ouvre avec une courte introduction schématique aux fonctions habituellement retrouvées dans un système de support de portfolio numérique. Des recommandations pour le choix d’un outil sont ensuite énoncées.

L’utilisation pédagogique est ensuite abordée par la présentation de témoignages d’enseignants du réseau collégial. Une méthode pour développer un scénario d’utilisation est ensuite présentée.

Enfin, le dernier texte relate l’expérience de la région Lorraine en France où l’utilisation du portfolio s’inscrit dans une démarche d’orientation tout au long de la vie, impliquant des acteurs gouvernementaux, de l’enseignement et des entreprises.

UNE VUE CONCEPTUELLE DU PORTFOLIO

Par Frank Fournier, conseiller pédagogique, Cégep de Saint-Jérôme

Cet article a pour objectif de décrire l’architecture typique d’un outil de gestion des portfolios au moyen d’un schéma général. Ce regard permet d’amorcer une réflexion sur les enjeux liés à l’introduction du portfolio dans un établissement, en particulier sur le plan de la planification de son utilisation.

Le portfolio est composé de projets. Plusieurs projets peuvent être regroupés dans une collection. La légende dans le coin supérieur droit indique les trois états possibles pour un projet. Il peut être masqué, par exemple, lorsqu’il est en cours de rédaction ou partagé. Un projet sous verrou est sous le contrôle exclusif de l’enseignant.

Des commentaires peuvent être associés aux projets. Ces commentaires ont deux états possibles : partagés ou masqués. Dans ce dernier cas, ils sont alors visibles uniquement pour l’étudiant et son enseignant.

L’espace réservé à l’étudiant peut habituellement être bonifié par des outils tels une zone de notification, un mur et une liste de participants.

Lorsque le statut d’un projet est partagé, il apparait dans une zone commune et devient visible pour d’autres étudiants et pour l’enseignant. Cet environnement de partage peut aussi donner accès à des services de messagerie et à des réseaux sociaux.

Ce coup d’œil permet d’anticiper les répercussions possibles de l’implantation d’un système de portfolio dans l’organisation. Par exemple, les fonctions de messagerie dans l’espace de partage et les fonctions d’échange de fichiers peuvent s’ajouter aux services similaires habituellement fournis par l’établissement, et on peut assister à un accroissement des canaux de communications. Une approche plus efficiente dans les versions futures serait la fédération de services qui permettrait d’intégrer de façon transparente des services complémentaires.

LE CHOIX D’UN OUTIL, UNE ÉTAPE CRUCIALE

Par Pierre-Julien Guay, coordonnateur, Vitrine technologie-éducation et président, Groupe de travail québécois sur les normes et standards en TI pour l’apprentissage, l’éducation et la formation

L’utilisation d’un portfolio numérique est souvent une initiative d’un enseignant dans un cours donné. Lorsque l’approche est fructueuse, on peut envisager deux types de contagion résultant en une utilisation accrue :

– L’apprenant souhaite conserver à long terme les traces de ses apprentissages;

– Le département tout entier, voire l’établissement, souhaitent intégrer le portfolio dans leur approche éducative institutionnelle.

C’est ici que les formats d’enregistrement des éléments d’un portfolio prennent toute leur importance. Or, ces formats varient selon les plateformes. Certains ont une approche maison avec un format unique et propriétaire.

Dès qu’on envisage le passage de l’apprenant d’une plateforme à une autre au fil de sa progression d’un niveau scolaire à un autre ou encore d’une organisation à une autre, il importe de pouvoir conserver et transférer le contenu du portfolio. Cela est particulièrement crucial dans une approche régionale ou l’apprenant peut conserver son portfolio de l’école à l’université, puis l’enrichir par des activités de formation d’ordre professionnel tout au long de sa carrière.

Un espace de partage

Fondamentalement, une plateforme de portfolio a pour fonction d’emmagasiner les travaux de l’apprenant et de gérer le flux de partage. Si l’enseignant peut attribuer une note et associer des commentaires à un travail, l’apprenant ne souhaite pas toujours partager cette information avec ses pairs et ses employeurs potentiels! Par contre, il souhaitera rendre visibles ses réalisations les mieux réussies et celles qui ont fait l’objet de commentaires élogieux de la part de ses pairs.

Pour chaque document, la plateforme doit normalement enregistrer :

– La date

– L’auteur (apprenant, enseignant, pair…)

– Le type de contenu (activité, rencontre, personne, organisation, plan)

– L’objectif rattaché au document (assertion, réflexion, preuve, réalisation)

– Le type de relation avec d’autres éléments

Un portfolio exporté au format LEAP2-A est ainsi présenté sous forme d’éléments situés en contexte par une catégorie tirée d’un vocabulaire contrôlé. De plus, chacun de ces éléments peut être mis en relation avec les autres, et c’est là que la richesse pédagogique se dégage. Une réalisation « vient appuyer » une production, une rencontre « a pour résultat » une publication, un commentaire « est une réflexion sur » une activité.

Le standard le plus utilisé est LEAP2A qui permet l’échange de portfolios entre Mahara et SHERPA, par exemple. Il est donc essentiel, lors du choix d’une plateforme de portfolio, de s’assurer qu’elle est compatible avec LEAP2A. À noter que certaines plateformes permettent aussi l’exportation en HTML, mais la structure des éléments et leur interrelation sont alors perdues.

DE PLUS EN PLUS AMBITIEUX : LE PORTFOLIO!

Par Émilie Lavery, professeure de littérature et de français au Collège Édouard-Montpetit et animatrice de Profweb

Ce parcours synthétique de l’usage du portfolio au collégial est tiré de la première visioconférence du labo VTÉ sur le portfolio numérique, tenue le 13 novembre 2012. Au cours de cette session, les participants ont pu entendre sept témoignages de l’utilisation du portfolio numérique par des enseignants du réseau collégial québécois.

Un portfolio d’évaluation des compétences, comme activité de synthèse du cours

Les premières utilisations du portfolio numérique eurent lieu en éducation au début des années 1990. Plusieurs pratiques du réseau collégial ont été documentées par Profweb une dizaine d’années plus tard. Yves Morin (2004), du Cégep Marie-Victorin, adopte le carnet de réflexion hebdomadaire en remplacement de l’examen final, ce qui lui permet d’évaluer la progression des apprentissages ainsi que les connaissances procédurales. L’outil pour le constituer reste au choix de l’étudiant (PowerPoint, Word ou alors plus récemment, Prezi).

Ginette Bousquet (2004), du Cégep de Sherbrooke, introduit dans son cours Démarche d’intégration des acquis en Sciences humaines, en activité synthèse, le portfolio de présentation en format PowerPoint. En optant pour le diaporama numérique, elle augmente la part de créativité du projet, son potentiel d’expressivité. C’est un parcours symbolique qu’emprunte le retour réflexif de l’étudiant sur ses apprentissages les plus significatifs au collégial. L’étudiant, en agençant à sa guise la vitrine de son portfolio, fait en sorte qu’elle le représente.

Ces deux professeurs observent l’effet bénéfique des stratégies métacognitives développées : l’étudiant peut se questionner sur ce qu’il a appris, commenter ce qu’il est en voie d’apprendre. Choisir ses méthodes pour l’atteinte des éléments de compétences du cours, c’est se donner le meilleur contexte d’apprentissage. Morin voit son taux de réussite grimper de 10 %. La mise en place de stratégies d’autoévaluation et d’autorégulation des connaissances augmente l’implication des étudiants. Ces enseignants complètent cette année leur dixième année d’utilisation. Ils retiennent comme critère de choix de l’outil celui de l’agrément de l’étudiant.Enseignants - Plateforme - faits saillants - Cours et activités - Valeur ajoutée

Un portfolio vocationnel pour les entrants et les sortants

L’arrivée du portfolio de carrière constitue l’une des applications les plus concrètes de l’approche orientante que l’école québécoise encourage depuis 2002 pour lutter contre les effets néfastes de la « faible connaissance des réalités du monde du travail et des choix de formations et de carrières possibles » sur la motivation et la diplomation.

Cette mesure, qui s’ajoute à d’autres, donne de bons résultats. En témoigne Serge-Philippe Tremblay (2012) du Cégep de St-Félicien, qui a introduit cette activité dans le cours Carrières en administration, un cours de 1re session tout à fait bien « rodé ». Son portfolio WordPress est un projet de session. Voilà un contexte favorable à la réflexion par l’étalement du temps et l’espace d’intimité introduits par le travail à domicile. Lors du stage d’observation, l’étudiant apprend bien des choses du milieu de travail qu’il ignorait et auxquelles il réagit. Il doit tenir également un registre des témoignages des conférenciers du milieu.

Autre outil à découvrir : le Webfolio, rapporte le conseiller pédagogique et répondant TIC Luc Blain, du Cégep de Sainte-Foy. Des professeurs de Gestion commerciale, de Design, de Sciences de la nature l’expérimentent (2012) depuis quelques mois. Le Webfolio, conçu par le Service de placement de l’Université Laval, puis adapté au collégial par les collèges de Sainte-Foy et de Drummondville, aide les étudiants à verbaliser leurs attitudes. À l’étape du questionnement qui apparaît en préambule, l’étudiant définit ses orientations professionnelles et valide ses choix de carrière. L’onglet « Connaissance du marché » alimenté par la banque d’information de Repère lui fait connaître plus de 400 professions. Une fois son choix validé, il explore la zone « Mon projet en action » pour la préparation de son CV, de l’entrevue ou pour l’établissement d’un plan professionnel incluant les impératifs de formation. Enfin la section « Mes documents » lui permet d’héberger les documents d’un petit portfolio d’apprentissage.Tableau en cinq colonnes identiques à l'image précédente

Un portfolio de formation en devenir

Le portfolio de formation rend d’immenses services même si sa pleine réalisation reste à venir. Certaines expériences concrètes montrent combien l’ouverture de passerelles d’accès aux productions des étudiants permet d’assurer une meilleure transition entre les cours. Lorsque deux cours traitent de la même compétence, le portfolio devient un atout, exprime l’enseignant en design d’intérieur Sylvain Lefebvre, du Cégep de Lanaudière à L’Assomption.

Ainsi en est-il pour son cours de troisième session Rendu (570-KVM-CA), constituant un préalable à son prolongement Rendu et maquette (570-KVM-CA). Le portfolio d’apprentissage facilite le transfert des connaissances lors de la session suivante. Sylvain Lefebvre corrige en ligne chaque exercice remis en format numérique. Chaque étudiant a ensuite accès à tous ses travaux corrigés et aux fichiers des meilleurs exercices du groupe identifiés comme des « Rendus de références ». Les rendus personnels et les rendus de référence permettent aux étudiants d’améliorer leurs techniques de représentation des matériaux pour leurs prochains travaux.

Le portfolio a également permis de régler de petits problèmes lors de l’épreuve synthèse des finissants de sixième session. Les enseignants confrontés à la mauvaise qualité des rendus de certains purent, sur la base des réussites antérieures de l’année précédente colligées au portfolio d’apprentissage, exiger des étudiants des rendus conformes à la qualité demandée. Sylvain Lefebvre voyait cette mesure d’aide appliquée bien au-delà de ses propres prévisions! Les activités de suivi qu’il avait eu l’occasion de pratiquer avaient des retombées certes imprévues, mais sans contredit utiles du point de vue de la formation!

Les témoignages des utilisateurs de la plateforme numérique SHERPA coïncident avec ces vues. Il serait bénéfique d’adopter le portfolio d’apprentissage dans plusieurs cours de la formation en arts visuels. « Cet accompagnement, précise Dgino Cantin (2011), du Cégep Limoilou, permet d’échelonner les défis jusqu’à l’activité synthèse de programme ». Celui-ci fait remarquer que la distance qui s’installe par le média et l’éloignement du temps de production sont favorables au processus d’autocritique « quand vient le temps de l’analyse ».

Les étudiants trouvent très stimulant d’organiser leur collection et de mettre en valeur leur travail dans le portfolio, explique Marie-Claude Smith (2011), du Cégep Lévis-Lauzon. Ils arrivent très facilement à utiliser la coquille, et même, ils personnalisent leur page. La particularité du portfolio SHERPA, c’est qu’il se gère à travers des projets. Chacune des pages peut être réunie dans une ou plusieurs collections. L’étudiant peut rendre son portfolio accessible aux participants qu’il souhaite accueillir, ou l’ouvrir à tous les utilisateurs SHERPA.

SHERPA permet également de créer des rétroactions sur le travail de l’étudiant, insiste pour dire Marie-Claude Smith. Dans le cadre d’un projet d’aide à la réussite de son Collège, elle expérimente les effets d’un réseau d’écoute issu de son établissement et composé d’un conseiller pédagogique, d’un aide pédagogique individuel à la réussite et d’un conseiller d’orientation.Tableau en cinq colonnes Même description que la première

Les témoignages rassemblés mettent en lumière la variété d’usage, de contextes et les faits saillants liés au choix de chacune des technologies adoptées pour la création du portfolio.

On le constate, l’intégration du portfolio couvre le spectre entier de la vie de l’étudiant, de son entrée au collège à sa sortie du collégial. Il serait souhaitable que le portfolio puisse évoluer avec lui!

PLANIFIER L’UTILISATION D’UN PORTFOLIO NUMÉRIQUE

Par Yves Munn, conseiller technopédagogique, Vitrine technologie-éducation

Ce texte porte sur les choix et les scénarios d’utilisation du portfolio numérique. Il est inspiré de la troisième visioconférence du labo VTÉ sur le portfolio numérique, tenue le 11 décembre 2012. Au cours de cette session, les participants ont pu assister à la présentation de l’invitée-experte Sophie Ringuet, conseillère pédagogique au Cégep @ distance.

Quelques principes de base

Lors du troisième laboratoire de la VTÉ sur le portfolio numérique, Sophie Ringuet, conseillère pédagogique au Cégep @ distance propose les lignes directrices suivantes pour aider les participants à faire un choix éclairé :

– Analysez vos besoins et déterminez vos intentions éducatives;

– Prenez le temps de structurer vos contenus avant de décider si le portfolio est l’outil approprié;

– Considérez les deux principales forces du portfolio numérique, soit celles :

– D’engager l’étudiant dans une démarche métacognitive;

– De permettre un suivi personnalisé de l’étudiant.

Considérez aussi la principale limite d’un portfolio numérique, soit l’investissement de temps qui sera nécessaire pour le suivi individuel de chaque portfolio numérique des étudiants.

Sophie Ringuet recommande que l’utilisation du portfolio numérique soit obligatoire pour tous les étudiants d’un même groupe. Son utilisation ne doit surtout pas être suggérée comme une activité pédagogique facultative. Les expériences antérieures démontrent que rares sont les étudiants qui en font un si son utilisation n’est pas obligatoire et suivie! En conséquence, considérez la charge de travail pour faire le suivi individuel de chacun des portfolios des étudiants. Commencez avec de petits projets, surtout pour les grands groupes d’étudiants.

Types de portfolio

Les principales finalités se déclinent en quatre catégories. Dans un dossier de la Vitrine technologie-éducation, Robert Bibeau (2007), en fait une description assez complète et rigoureuse. Il s’agit du portfolio de présentation, du portfolio d’apprentissage, du portfolio d’évaluation et du portfolio de développement professionnel.

Portfolio de présentation

Ce type de portfolio, axé sur le produit final, présente généralement une collection des meilleures productions de l’étudiant ou celles ayant une valeur plus significative. On peut l’associer au portfolio des artistes.

Portfolio d’apprentissage

Ce type de portfolio est plus axé sur le processus d’élaboration du travail de l’étudiant plutôt que sur le produit final. Il présente généralement une collection de productions et de réflexions faisant foi des progrès de l’étudiant sur une période donnée. Ce portfolio favorise le processus de métacognition par l’évaluation formative.

Portfolio d’évaluation

Ce type de portfolio permet de porter un jugement sur une collection de productions. Il s’inscrit dans un processus d’évaluation sommative qui permet de vérifier l’atteinte des compétences acquises par l’étudiant.

Portfolio de développement professionnel

Ce type de portfolio présente une collection de productions et de réflexions documentant son cheminement professionnel dans le temps. Il comprend généralement un curriculum vitæ.

Un portfolio numérique pourrait combiner plusieurs types lors d’un même projet. Par exemple, un enseignant peut élaborer un portfolio combinant les types apprentissage et évaluation. Sophie Ringuet souligne cependant que, souvent dans ce cas, l’étudiant est porté à penser qu’il n’a pas le droit à l’erreur. Il pourrait être plus réticent à mentionner ses difficultés si la démarche d’apprentissage n’est pas bien expliquée par son professeur.

Méthode pour développer un scénario d’utilisation

Lors du laboratoire VTÉ, Sophie Ringuet a également proposé une méthodologie comprenant quatre étapes pour développer un scénario d’utilisation d’un portfolio numérique.

S’assurer des conditions essentielles de base

Il faut, en premier lieu, s’assurer que les étudiants puissent accéder facilement au logiciel du portfolio numérique et qu’ils puissent y disposer d’un espace de stockage suffisant pour l’ensemble du projet. Il faut aussi prendre en considération que les étudiants, les professeurs et les autres collaborateurs doivent être accompagnés dans l’exploration du logiciel de portfolio. Cela peut comprendre du temps de formation, la production d’aide-mémoire ou de procédures d’utilisation, sans négliger l’apport du soutien technique pour pallier les problèmes possibles d’ordre logiciel et informatique.

Avant de commencer le portfolio numérique, il faut que :

– Les étudiants comprennent qu’ils seront des auteurs publics sur la plateforme, ce qui suppose une certaine réflexivité de leur part;

– Les communications doivent s’y faire de manière éthique comme pour tout autre logiciel social;

– Les règles en lien avec le droit d’auteur et les mentions de la propriété intellectuelle doivent être rigoureusement respectées.

Si le portfolio est utilisé par plusieurs dans un programme d’étude :

– Rechercher l’adhésion des enseignants de la formation spécifique et générale;

– Prendre du temps en équipe pour planifier et pour discuter de l’utilisation du portfolio numérique en considérant les buts, les cours porteurs, l’évaluation, etc.;

– Élaborer un scénario dans le cas où des étudiants ne feraient pas tous les cours du programme : RAC, changement d’institution et autres possibilités.

Déterminer le rôle des intervenants et les finalités du portfolio numérique

Un moyen efficace de cerner les finalités et le type de portfolio que vous devriez utiliser est de déterminer le rôle des acteurs qui auront, de près ou de loin, à intervenir dans le cycle de vie du portfolio numérique.

L’acteur principal du portfolio est-il l’étudiant ou le professeur?

Si c’est l’étudiant, fait-il son portfolio :

– Pour lui-même;

– Pour partager avec le ou les professeurs;

– Pour partager avec ses pairs;

– Pour partager avec d’autres personnes : experts, milieu de stage, employeurs, famille, amis, etc.?

Si c’est le professeur, fait-il son portfolio :

– Pour lui-même;

– Pour partager avec les étudiants;

– Pour partager avec d’autres personnes : employeurs, collègues, réseau, amis, etc.?

Les objectifs d’enseignement et d’apprentissage que vous atteindrez en utilisant le portfolio seront différents pour chacun des quatre types de portfolio. À cette étape, il faut que l’étudiant puisse percevoir la valeur ajoutée du portfolio pour lui. C’est ici un élément motivateur essentiel pour qu’il s’investisse dans la réalisation du projet.

Voici quelques exemples de finalités répertoriés par type :

Pour un portfolio de présentation axé sur le produit, les buts pour l’étudiant pourraient être de :

– Présenter ses travaux au terme d’un cours, d’une session, d’un programme et de recevoir de la rétroaction formative;

– Présenter un exemplaire de ses meilleurs travaux à un employeur en vue d’une admission dans un programme ou une institution;

– Amener l’étudiant à parler de ses apprentissages, de ses réussites, de ses champs d’intérêt et de ce qui le motive.

Pour un portfolio d’apprentissage axé sur un processus, les buts pourraient être de :

– Amener l’étudiant à prendre conscience de ses apprentissages et de sa démarche d’apprentissage;

– Favoriser le développement d’habiletés et stratégies à s’autoévaluer, à se fixer des buts pour s’autoréguler;

– Déterminer ses forces et ses difficultés;

– Faire un suivi personnalisé du cheminement de l’étudiant.

Pour un portfolio d’évaluation, les buts pourraient être de :

– Recueillir des preuves de la maîtrise d’une ou de plusieurs compétences;

– Faire de la reconnaissance des acquis;

– S’assurer que toutes les compétences ont été acquises pendant une formation.

Pour un portfolio de développement professionnel, les buts pourraient être de :

– Présenter son cheminement, ses compétences, ses réalisations;

– Partager son expertise et ses expériences;

– Valider ses acquis, de reconnaître ses compétences, de planifier sa formation ou de gérer son cheminement de carrière;

– « Documenter son cheminement, de systématiser sa démarche de réflexion et de développer une plus grande conscience de sa pratique, de l’analyser et de prendre des décisions éclairées menant à son développement professionnel et personnel » (Bibeau, 2007).

Planifier le scénario

Pour bien planifier l’utilisation du portfolio, il faut tenir compte de la structure du contenu qui servira lors du dépôt des différents éléments par l’étudiant. Plus il y aura de contenu déposé, plus son organisation prend de l’importance. Une bonne planification permet aussi de prévoir les étapes à réaliser et les tâches de chaque acteur dans le temps. Voici quelques activités à prévoir :

– Une présentation de la démarche d’utilisation du portfolio dans le cours ou le programme.

– Une démonstration de l’importance du portfolio et de la valeur ajoutée pour l’étudiant. Cela lui permettra de comprendre pourquoi il vaut la peine de faire des efforts et d’investir du temps pour réaliser un portfolio et que cela lui rapportera.

–Une présentation des exemples, votre portfolio ou celui d’anciens étudiants. Encore mieux, pourquoi ne pas demander à un ancien étudiant de témoigner des bénéfices qu’il a tirés de son portfolio numérique?

– Des activités d’appropriation de l’outil portfolio, comme des exercices pratiques intégrés dans la démarche.

À chacune des étapes du cours, déterminez les tâches qui doivent être faites, qui les fera et combien de temps cela prendra. Idéalement, intégrez des activités qui favorisent la métacognition. Il faut soutenir l’étudiant tout au long de la démarche.

Dans un article sur la place d’un portfolio électronique dans une démarche d’apprentissage , Ginette Bousquet, enseignante au Collège de Sherbrooke, suggère de planifier le portfolio en trois grandes étapes :

– Mes apprentissages (finalité : apprentissage)

– Mes bilans (finalité : présentation et évaluation)

– Mes réflexions

Sophie Ringuet souligne d’ailleurs l’importance de demander à l’étudiant de réfléchir à ses apprentissages à partir de réalisations concrètes et d’expériences vécues dès le départ plutôt que de réfléchir à ses compétences ou son apprentissage, puis de trouver ensuite des expériences concrètes qui corroborent sa réflexion!

Valider le scénario

L’importance de valider votre scénario d’utilisation n’est pas à négliger. Évaluer d’abord la pertinence de l’utilisation d’un portfolio. Quelle sera sa pertinence tant pour l’étudiant que sur le plan pédagogique?

En ce qui concerne la qualité des données, soit le contenu du portfolio, et la démarche proposée, Sophie Ringuet propose d’évaluer les points suivants :

– Le contenu recherché

– L’échéancier

– Les éléments de motivation

– La faisabilité du portfolio choisi

– Les aspects concernant la métacognition, l’objectivation et l’autorégulation

– L’organisation et la structure du portfolio

– Les modalités et les critères d’évaluation

– La rétroaction

– Les aspects éthique, juridique et éthique

Pour ce qui est des modalités de gestion, deux grands aspects sont aussi à valider : la gestion pédagogique et le volet technologique. Concernant la gestion pédagogique, il est bon de se questionner sur la place du portfolio numérique dans le programme de formation et sur la démarche d’évaluation des apprentissages qui accompagne le portfolio. Terminez par l’évaluation des aspects comme le choix de l’outil, la formation et le soutien technique.

LORFOLIO

Un portfolio de développement professionnel à l’échelle de toute une région

Propos d’Emmanuel Journot, directeur de projet à Inffolor, le Centre lorrain d’animation, de ressources et d’information sur la formation (Carif), recueillis par Pierre-Julien Guay, Vitrine technologie-éducation

Lorfolio est un projet expérimental de portefeuille numérique de compétences, d’une durée de cinq ans, amorcé en 2007 et financé par le Conseil régional de Lorraine en réponse aux difficultés de reconversion industrielle et de recherche d’emploi.

L’objectif du projet est de permettre aux travailleurs et demandeurs d’emploi lorrains de capitaliser et valoriser leurs compétences acquises par la formation et par l’expérience au moyen d’un outil numérique personnel. Pour les demandeurs d’emploi, la démarche est accompagnée par le service public Pôle emploi. Au terme de l’exercice de documentation du portfolio numérique, les données peuvent être exportées en format PDF ou dans un espace en ligne pour être présentées lors d’une entrevue d’embauche. Cet outil peut également être utilisé par les salariés désireux de faire le point sur leurs compétences dans une approche réflexive de leur parcours professionnel.

Le projet, financé par des fonds publics (Région Lorraine + Europe), a été confié au service de formation continue Inffolor qui œuvre dans le domaine de la formation des adultes. Un prototype a été expérimenté auprès de 4000 utilisateurs et 500 accompagnateurs, et une version complète est déployée depuis février 2013.

L’approche est principalement axée sur la préparation d’un portefeuille de compétences en offrant une traçabilité du parcours. Elle permet également de préparer un inventaire des compétences à acquérir lors d’une démarche de reconversion professionnelle. Les nouvelles compétences acquises par apprentissage peuvent être ajoutées. Le référentiel de compétences utilisé est le Répertoire opérationnel des métiers et des emplois (ROME) développé par Pôle emploi.

Une grande variété d’acteurs ont été mobilisés au sein du comité de pilotage chargé de l’évaluation et de l’amélioration de la plateforme pour un territoire régional bien précis. Le Pôle emploi agit en matière d’accueil, d’information et d’orientation. Une concertation avec les acteurs de l’éducation nationale permet aux lycéens qui terminent leur formation de s’approprier l’outil afin de décrire leurs compétences acquises. En enseignement supérieur, l’Université de Lorraine utilise également la plateforme. La concertation avec les entreprises et le secteur professionnel, déjà amorcée, est en cours de consolidation.

L’expérience d’accompagnement par les professionnels impliqués a suscité une réflexion positive sur leurs pratiques de suivi et d’information. Parmi les difficultés rencontrées en cours de projet, le degré et le coût d’accompagnement de la part des professionnels chargés de l’accueil, de l’orientation et de la formation restent difficiles à mesurer.

La plateforme logicielle a été conçue sur mesure par une société à partir de solutions libres. L’interopérabilité est assurée par l’importation/exportation en format XML, et le support au format LEAP2A sera bientôt opérationnel.

Pour 2013, le Conseil régional de Lorraine soutient le déploiement à grande échelle dans la région. De nouveaux acteurs tels les syndicats de salariés, les représentants patronaux et les chambres de commerce seront associés à ce déploiement. On envisage le développement d’une passerelle facilitant la démarche de validation des acquis de l’expérience et des liens vers d’autres référentiels de compétences.

À propos de l'auteur

Yves Munn

Yves Munn est chargé de projets pédagonumériques à l’Université du Québec à Montréal. Il bénéficie d’un parcours professionnel riche et varié depuis plus de 35 ans. Membre de la Commission de l’enseignement et de la recherche universitaire (CÉRU) du Conseil supérieur de l’éducation (CSE) du Québec, Yves Munn est également connu pour ses réalisations en tant que conseiller pédagogique en apprentissage en ligne et de réalisateur pour le service des affaires publiques et de l’information de la Société Radio-Canada. De 2012 à 2014, il a été conseiller technopédagogique pour la Vitrine technologie-éducation. Grâce à sa riche expérience, Yves Munn a développé une expertise pointue en matière de pédagogie et d’innovation au service de l’enseignement et de l’apprentissage. Il est également reconnu pour sa veille pédagogique active en éducation supérieure.

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Denis Chabot
Denis Chabot
12 septembre 2011 15h50

Très intéressant comme témoignage, cette utilisation d’un wiki pour amener les élèves à partager un contenu co-construit. Ce serait vraiment intéressant de partager ce matériel avec l’ensemble des internautes, à la manière de Wikipédia. Est-il possible d’envisager une telle « publication » avec les travaux des élèves?

Isabelle Delisle
Isabelle Delisle
15 septembre 2011 14h36

Merci pour ce récit!
Je partage à mes enseignants d’histoire!

Séverine Parent
Séverine Parent
16 septembre 2011 17h23

Merci beaucoup Pierre d’avoir pris le temps de partager cette aventure! C’est vraiment intéressant que tu aies continué pour une seconde année, et ce, malgré une certaine incertitude à gérer du coté des étudiants. Ce n’est pas qu’un exemple d’intégration des TIC, mais aussi un changement d’approche pédagogique!

Séverine Parent
Séverine Parent
19 septembre 2011 17h54

Bonjour Denis,

Les wikis utilisés par Pierre dans ses classes ne sont pas accessibles publiquement.

Il s’agit de contenu produit par des étudiants, pour la plupart en première année au cégep. Nous étions donc très soucieux de leur identité numérique. Nous avons pris cette décision de restreindre l’accès pour préserver l’identité numérique des jeunes qui doivent obligatoirement y participer dans le cadre du cours.

La nature même du travail implique un processus itératif qui donne droit à l’erreur. Les versions successives sont des versions « en construction » et nous n’avons pas vu d’avantages pour les étudiants de les rendre publiques.