La rétroaction vidéo personnalisée après un examen – Retour sur un article de Pédagogie collégiale
Enregistrer une rétroaction vidéo personnalisée pour un étudiant qui a échoué un examen? C’est ce que propose Isabelle Cabot, « La rétroaction vidéo personnalisée : une exploration de son efficacité », paru dans le numéro du printemps 2018 de Pédagogie collégiale.
Le choix d’une méthode de rétroaction vidéo
Inspirée par les travaux de Julie Roberge et ceux de Catherine Bélec, et par l’utilisation de la vidéocapture d’écran que faisait sa collègue Marie-Claude Lévesque, Isabelle Cabot a voulu intégrer les rétroactions audiovidéo à sa pratique enseignante. Elle enseigne la psychologie, et voulait utiliser la vidéo pour corriger des examens. Cependant, elle trouvait 2 désavantages à le faire par vidéocapture d’écran :
- L’obligation de numériser les copies pour corriger à l’écran
- L’obligation de corriger dans un environnement silencieux, pour que la voix soit claire sur l’enregistrement
Isabelle Cabot a donc opté pour un format de rétroaction vidéo qui lui convenait mieux.
- D’abord, elle corrige l’examen sur papier de façon traditionnelle, là où elle le désire (au collège, dans un café, etc.).
- Ensuite, dans un lieu calme, elle utilise une caméra web tournée vers la copie de l’étudiant pendant qu’elle formule des rétroactions verbales.
Isabelle Cabot dépose ensuite les vidéos sur YouTube, sur une chaîne non répertoriée, puis envoie à chaque étudiant, par courriel, le lien vers la vidéo qui lui est adressée.
Un projet de recherche en Sciences de la nature
Dans le cadre d’un projet de recherche, à l’automne 2016, Isabelle Cabot a invité 6 enseignants de son collège (Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu) à utiliser la rétroaction vidéo personnalisée. Ce projet visait à diminuer les abandons en Sciences de la nature. Les enseignants participants donnaient des cours de mathématique, de chimie et de physique en première année.
Les enseignants ont enregistré des commentaires comme le faisait Isabelle Cabot : une caméra pointée sur la copie papier de l’examen corrigé.
Ils ont enregistré des rétroactions seulement pour les étudiants qui avaient échoué l’examen corrigé.
Exemple d’une rétroaction enregistrée par une enseignante de mathématique. (Les premières secondes ont été coupées pour préserver l’anonymat de l’étudiant visé.)
Les étudiants sont ravis!
Les étudiants visés par les rétroactions vidéo ont aimé pouvoir revoir les explications de l’enseignant à volonté. Ils jugent que ces explications leur ont permis de mieux comprendre leurs erreurs.
De plus, quantitativement, les rétroactions vidéo sont liées à de meilleurs résultats finaux dans les cours concernés.
La vidéo m’a vraiment encouragée à rester dans ce cours ! Elle m’a démontré que je pouvais réussir et que mon prof s’intéresse à ma réussite. J’ai vraiment apprécié ce geste!
Mais ça représente beaucoup de travail pour les enseignants…
Enregistrer une rétroaction de 10 minutes, en plus du travail de correction sur papier, représente évidemment une charge de travail additionnelle pour l’enseignant.
À cela s’ajoute le temps nécessaire au dépôt des vidéos sur YouTube. Puis, il faut rédiger des courriels personnalisés pour transmettre les vidéos à chacun des étudiants. J’ai moi-même testé un procédé similaire et je partage l’avis de l’un des enseignants participants : le processus est répétitif et stressant. Il ne faut pas se tromper en envoyant la mauvaise vidéo à un étudiant!
Ceci dit, les efforts investis n’en valent-ils pas la peine, s’ils contribuent à la réussite des étudiants?
Une pratique inspirante pour mon enseignement
J’ai déjà utilisé la rétroaction vidéo pour corriger les rapports de laboratoire de mes étudiants. Je corrigeais l’entièreté des rapports de laboratoire à l’écran, dans des vidéos de plus de 20 minutes. Comme je parlais, j’écrivais moins sur les copies.
J’ai (tout à fait non scientifiquement) remarqué que les étudiants plus faibles semblaient plus intéressés par cette méthode que les plus forts. Peut-être que les plus forts, habiles lecteurs, « perdaient » un peu de temps à m’écouter corriger l’entièreté de leurs rapports, alors que lire des commentaires plus complets en marge aurait été aussi clair pour eux. En ce sens, l’idée de commenter seulement les copies des étudiants plus faibles me semble une voie très intéressante.
Et la réutilisation des examens?
Reste un problème à solutionner : une fois une question d’examen filmée et diffusée sur YouTube (même en mode non répertorié), il est malvenu de la réutiliser dans un examen futur. Certains enseignants participants estiment que « le fait de réutiliser les mêmes questions contribue à leur validité » au fil du temps. Ils ne souhaitent donc pas les rendre inutilisables en les filmant (Cabot, 2017, p.99).
Dans son rapport de recherche, Isabelle Cabot n’identifie pas de solution à ce problème. Les suggestions sont bienvenues! Faites-nous part de vos idées dans la zone de commentaires!
J’enseigne le français langue seconde et mes élèves expriment les mêmes commentaires au sujet de la pertinence de cette rétroaction. « J’ai l’impression que vous êtes assis à côté de moi et j’aime pouvoir réécouter l’enregistrement » (surtout dans une langue seconde). Dans le même esprit, je filme les exposés oraux que je télécharge dans Youtube en mode non répertorié aussi. Cette fois, la vidéo fait en sorte que ma rétroaction est moins pertinente que leur autoévaluation. On a beau dire à un ou une élève qu’elle a joué dans ses cheveux ou qu’elle s’est dandinée sur place du début à la fin, ça ne veut rien dire puisqu’elle l’a oublié dès la fin de sa présentation. Se voir faire… comme on dit, vaut 1000 mots. https://ant.umn.edu/ permet de commenter des vidéos au fur et à mesure de l’écoute.
Excellente idée de filmer les étudiants pendant leurs exposés oraux!
Pour ceux que VideoAnt intéresse, Profweb en a parlé dans un article: http://eductive.ca/3-plateformes-en-ligne-pour-creer-des-contenus-video-interactifs-pour-les-etudiants