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6 septembre 2006

Expérimentation de l’approche socioconstructiviste

Ce texte a initialement été publié par Profweb sous licence CC BY-NC-ND 4.0 International, avant la création d’Éductive.

Le programme de Techniques de comptabilité et de gestion au Cégep de Victoriaville s’inscrit maintenant à l’intérieur du projet Nom@d permettant à chaque élève d’avoir un ordinateur portable en classe. C’est en première session du programme que se situe l’expérimentation relatée ici.

Motivation de départ

Une clientèle avec des acquis différents

Depuis quelques années, les élèves nous arrivent avec des acquis bureautiques de différents niveaux. Plusieurs ont suivi des cours de base en traitement de texte au secondaire, d’autres ont appris par eux-mêmes. Il y a aussi ceux qui pensent qu’ils savent, mais qui ne savent pas qu’ils ne savent pas, quelques-uns n’ont aucune connaissance informatique. Tout ce beau monde se retrouve dans la même classe. Alors, pour le professeur, c’est l’école de rang avec tous ces niveaux.

Dans un tel environnement, tous les élèves ont les mêmes exercices à faire à partir d’un livre. Comment garder la motivation des élèves qui maîtrisent déjà certaines notions lorsque le professeur donne des explications ou fait une démonstration en classe-laboratoire? Ceci n’est pas une chose facile. J’ai essayé de mettre à profit la capacité des élèves forts pour aider ceux qui ont plus de difficulté, mais cela ne fonctionne pas. Les élèves forts ont l’impression de perdre leur temps. Ils parlent et distraient les autres, passent de longs moments à naviguer sur le Net, répondent à leurs courriels et finissent par assister occasionnellement aux cours.

Le développement d’une pédagogie active

J’enseigne la bureautique et, depuis longtemps, je réfléchis sur la manière de faire acquérir les savoir-faire aux élèves qui suivent un cours sur l’apprentissage des logiciels. Ma principale préoccupation est de faire faire aux élèves des apprentissages « qui rapportent ». Le domaine de la bureautique évolue constamment et les versions nouvelles des logiciels se multiplient avec les années. Il est déraisonnable, selon moi, de penser qu’un utilisateur doive s’inscrire à un cours pour mettre à jour ses connaissances lui permettant de suivre l’évolution des TIC. Comment faire en sorte d’éviter constamment ce retour sur les bancs d’école? Forte de ma pratique personnelle, je savais que la seule façon d’acquérir la maîtrise était la construction de mon savoir par l’expérimentation, par essais ou erreurs, et par le transfert de connaissances acquises avec d’autres logiciels. Poursuivant le but de faire faire des apprentissages significatifs, l’important était donc de développer, dans mes cours, des stratégies permettant à l’élève d’apprendre à apprendre.

Nom@d, un projet tout indiqué pour faire du changement

Avec l’achat d’un ordinateur portable par les élèves de première année du programme de Techniques de comptabilité et de gestion, c’était l’occasion rêvée d’expérimenter une nouvelle approche. Plusieurs raisons motivaient un changement de cap dans mon enseignement :

  1. le coût d’achat du portable assumé par l’élève me rendait mal à l’aise d’exiger l’achat d’un livre obligatoire;
  2. la possibilité de retrouver sur Internet toutes les notions pour l’apprentissage des logiciels;
  3. la capacité pour l’élève d’avoir accès à l’information en tout temps.

En plus de vouloir faire acquérir des connaissances par une pédagogie active permettant à l’élève d’apprendre à apprendre, je voulais aussi faire développer des compétences transversales telles que l’autonomie, l’entraide, le travail d’équipe. L’approche socioconstructiviste m’apparaissait comme le meilleur outil de pédagogie active.

Je procède donc à la construction d’un Intranet rattaché au DECclic. Il est possible avec DECclic d’utiliser en page d’accueil un site web indépendant de la plateforme et, par conséquent, réalisé avec une autre application informatique. Le site est construit avec le logiciel FrontPage. Pour chaque module du cours : (OutlookPowerPointWordExcel), on y retrouve des exercices d’apprentissage, l’objectif de l’exercice, les notions que l’élève va apprendre, les consignes, les corrigés en format PDF, etc. L’élève y retrouve aussi des liens vers des sites de formation de la suite Microsoft Office, le plan de cours, la grille de correction, des consignes sur la sécurité de son portable, des liens vers des sites de recherche d’emploi, etc.

De plus, comme nous étions depuis peu un cégep Vert Brundtland, il était à propos d’adopter des pratiques pour protéger l’environnement. J’ai insisté auprès des élèves pour qu’ils utilisent les possibilités offertes par l’ordinateur. Par exemple, au lieu d’imprimer les consignes, les élèves ont appris à travailler avec plusieurs fenêtres ouvertes. Ainsi, le projet Nom@d montrait aux élèves à travailler autrement. Nous étions une « classe sans papier ».

Vécu dans la classe

Dès le début des cours à l’automne, les élèves sont mis au courant du type de pédagogie que je veux utiliser et j’ai leur approbation. Je leur fais une démonstration du site Intranet, leur explique le fonctionnement du DECclic, leur donne des consignes sur la manière de remettre les travaux et les examens, leur suggère des façons de travailler, etc. Tous les exercices pour chacun des modules se retrouvent sur le site Intranet et les apprentissages doivent être terminés à une date connue de l’élève.

Pour les modules portant sur PowerPoint et Word, les élèves font les exercices en se référant, au besoin, à des sites de références en ligne. Par contre, pour le module Excel, je fais une démonstration des notions à acquérir, étant donné que presque la totalité des élèves n’ont jamais utilisé ce logiciel. Cette façon de procéder ne donne pas les résultats escomptés puisque je passe le reste de la période à donner les mêmes explications individuellement. Durant la période, je n’arrive pas à répondre à tous les élèves. Je décide de modifier ma façon de faire : pour démontrer les notions au tableau. Dorénavant, les élèves devront, pour résoudre le problème, chercher les notions en se référant aux sites de formation sur le web, en utilisant les manuels mis à leur disposition sur le bureau du professeur ou de la professeure à chaque cours, en demandant de l’aide à leurs collègues, puis au professeur, en dernier recours. En procédant ainsi, je suis davantage en mesure de développer, chez l’élève, les compétences transversales prônées dans le profil de sortie de l’élève du programme de Techniques de comptabilité et de gestion telles que l’autonomie, l’entraide et la capacité de travailler en équipe. Cela donne de bons résultats. Il y a vraiment un esprit de collaboration qui s’installe dans le groupe. Les élèves sont très motivés au point qu’ils ne prennent pas de pause entre les cours et restent jusqu’à la fin. Cette façon de faire est aussi très satisfaisante pour le professeur puisque j’arrive à répondre à tous les élèves qui m’ont demandé de l’aide pendant le cours.

Les problèmes vécus

L’incapacité de faire le suivi des apprentissages

Les élèves devaient m’envoyer par courriel deux exercices par semaine faits avec Excel. Dans mon enthousiasme du départ, je n’avais pas réalisé que deux exercices à remettre par semaine avec 60 élèves, cela faisait 120 exercices à corriger, à annoter et à retourner par courriel. J’ai également deux autres cours où j’utilise des logiciels, et ce, dans deux autres programmes. J’étais incapable de faire le suivi des apprentissages à cause de la lourdeur de la correction. Après cette constatation, j’en ai discuté avec les élèves et les ai informés que j’avais mis sur le site Intranet des solutionnaires avec les formules en format PDF et qu’en cas de doute de faire appel à moi. L’an prochain, pour remédier à ce problème, je vais utiliser Exam Studio (logiciel d’évaluation développé par la Plateforme collégiale DECclic) pour faire la correction de tous les exercices. Ainsi, les élèves auront une rétroaction sur chaque exercice et j’aurai un suivi de leurs exercices et de leur niveau de réussite.

Les démonstrations sont inutiles

Comme je l’ai dit précédemment, les démonstrations ne servent à rien, les élèves, presque à tour de rôle, me demandent les mêmes explications déjà données au tableau. Alors, je constate que c’est une perte de temps et je change de méthode : j’insiste pour qu’ils trouvent les notions sur Internet, qu’ils demandent à leurs collègues, puis au professeur en dernier lieu, évitant ainsi de répondre continuellement aux questions.

Des résultats positifs

Après quatre à cinq semaines, les habitudes de collaboration, d’entraide, de travail en équipe se développent. Les élèves ont de moins en moins recours au professeur, utilisent de plus en plus les livres mis à leur disposition, demandent de l’aide à leurs collègues.

À la fin du semestre, je crois que j’ai atteint les objectifs que je m’étais fixés au point de départ, soit de développer :

  • l’autonomie chez l’élève;
  • l’esprit d’entraide;
  • des stratégies qui permettent à l’élève d’apprendre à apprendre.

Je suis très fière de mon expérimentation. Je crois fermement que les élèves ont fait des apprentissages significatifs. Les élèves m’ont dit qu’ils avaient beaucoup aimé travailler de cette manière.

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