Un projet pour le programme de Sciences humaines : un cours multidisciplinaire offert en mode virtuel
Manon Pilon enseigne depuis 25 ans en géographie au collège de Bois de Boulogne. Elle agit également comme coordonnatrice de programme Sciences humaines. Françoise Marceau lui a parlé par une belle journée de printemps et elle a accepté de nous livrer une petite parcelle de son expérience.
Tu enseignes en géographie dans le programme de Sciences humaines depuis plusieurs années. Est-ce que les TIC ont toujours pris place dans ta pratique pédagogique?
Oui, mais l’intégration s’est faite de manière bien progressive. Au début, j’utilisais Word pour prendre des notes personnelles sur différentes thématiques et je suis ensuite passée à une étape de production de notes de cours pour mes élèves. Par la suite, j’ai tiré profit d’Internet pour trouver de nouvelles informations et j’ai incité mes élèves à fouiller sur Internet dans le cadre d’activités d’apprentissage. Maintenant, j’intègre différents contenus et activités d’apprentissage dans la plateforme du DECclic que j’utilise également pour encadrer mes élèves.
Quels ont été les éléments déclencheurs qui ont fait en sorte que tu t’es lancée dans une aventure d’intégration des technologies?
En premier lieu, je dirais qu’il est bien difficile de passer à côté des technologies qui font partie de la vie des élèves. Déjà, au secondaire, l’ordinateur n’a plus beaucoup de secret pour eux et Internet constitue une source documentaire incontournable. Notre défi consiste plutôt à les amener à raffiner leurs méthodes de recherche et à reconnaître les informations valides et pertinentes.
J’ajouterais que j’aime innover. L’utilisation des technologies et notamment d’Internet me permet de trouver des contenus récents et pertinents, et également de varier mes activités d’enseignement et d’apprentissage.
Concernant le cours multidisciplinaire sur Internet dont il est question dans ce récit, la facilité d’accès ainsi que le soutien offert directement dans mon collège ont favorisé encore plus l’intégration.
Peux-tu nous parler un peu plus de ce projet?
Je dois d’abord dire que je n’étais pas seule dans cette aventure puisque plusieurs profs du programme se sont impliqués. Des réflexions d’équipe ont entraîné la création d’un cours multidisciplinaire dans le cadre de l’implantation du nouveau programme (profil sans mathématiques). De manière plus spécifique, ce cours a pour but d’enrichir les connaissances disciplinaires de l’élève dans sept disciplines du programme : anthropologie, science politique, sociologie, géographie, histoire, psychologie et économique. À la fin de son parcours dans le programme, l’élève est amené à mettre à profit les apprentissages réalisés la première année dans ces disciplines, mais aussi dans les cours de méthodologie et de méthodes quantitatives.
En plus de préparer l’élève à réaliser l’activité d’intégration par une expérimentation poussée de l’autonomie et de la méthode, dans un mode virtuel, cette solution nous a amenés à éviter de prioriser une discipline au détriment d’une autre et a permis l’atteinte explicite de quatre des buts généraux du programme :
- Distinguer les principaux faits, notions et concepts de nature disciplinaire et transdisciplinaire reliés à l’objet d’étude : le phénomène humain.
- Concernant cet élément, les élèves sont amenés à traiter des différents concepts, faits et notions des disciplines de sciences humaines au travers d’une thématique unique, soit L’EAU, pour les années 2004 et 2005.
- Utiliser les technologies de traitement de l’information appropriées. L’obligation pour les élèves d’accéder et d’utiliser le DECclic pour accéder aux contenus de cours et pour communiquer avec les profs fait en sorte qu’ils développent leurs habiletés à utiliser les technologies.
- Utiliser des méthodes de travail et de recherche nécessaires à la poursuite de ses études. Les activités d’apprentissage proposées amènent les élèves à utiliser des méthodes variées qui devraient facilement être réinvesties dans le cadre de leurs études.
- Communiquer sa pensée de façon claire et correcte dans la langue l’enseignement. La communication par courriel de même que la production d’un travail écrit obligent l’élève à formuler clairement ses idées en utilisant adéquatement la langue.
En plus d’être un projet vraiment intégrateur, l’utilisation du DECclic a eu pour effet de restreindre les problèmes de locaux et d’horaire puisque plusieurs activités ainsi que l’encadrement des élèves se réalisent à distance.
Est-ce que les membres de l’équipe programme étaient des habitués des TIC et plus particulièrement du DECclic?
Pas vraiment! Tous les profs utilisaient Word, mais personne n’était familier avec le DECclic. Pour plusieurs, c’était la première expérience d’utilisation des technologies avec leurs élèves.
Comme les profs voulaient travailler ensemble et monter un cours multidisciplinaire, le projet intégrateur a semblé la meilleure solution. Cela a été l’amorce d’une intégration des TIC dans leur pratique pédagogique.
À la suite de l’expérience avec le cours multidisciplinaire, plusieurs profs intègrent maintenant le DECclic dans leur pratique pédagogique à des degrés variables. Certains y ont placé tout le contenu de leur cours alors que d’autres se limitent à utiliser les possibilités en matière d’évaluation.
Qu’est-ce qui vous a aidés dans la création du matériel pédagogique et sa mise en ligne dans le DECclic?
Nous avions la chance de pouvoir compter sur des personnes-ressources pour nous aider dans notre démarche. Nous avons reçu une formation sur l’utilisation du DECclic, avons été supportés par un prof qui était dégagé une journée par semaine pour nous accompagner et une conseillère pédagogique nous a aidés à développer le matériel pédagogique.
Et qu’en est-il de l’encadrement des élèves?
Afin d’aider les élèves dans leur démarche d’apprentissage, le cours propose une démarche individualisée, une forme de tutorat où l’élève évolue à son rythme à partir d’un échéancier imposé. Il est possible que des rencontres avec le tuteur et les autres élèves soient tenues durant la session. Ces rencontres sont obligatoires. L’élève peut aussi communiquer et prendre rendez-vous avec un de ses professeurs (pour les questions disciplinaires) et son tuteur (pour les questions techniques et disciplinaires si le tuteur est responsable du module) à l’aide de la messagerie du DECclic.
De manière plus spécifique, le professeur aide à la compréhension du contenu, veille à la réussite des élèves et est responsable de l’évaluation. Quant au tuteur, il tente de maintenir la persévérance de l’élève, veille à son cheminement, soutient sa motivation, effectue un suivi de l’échéancier et l’aide à gérer son temps.
Comment qualifiez-vous votre expérience collective?
Tout au long des rencontres, les profs ont défini le projet; se sont formés; ont discuté des exigences pédagogiques (contenu relatif à chacune des disciplines, longueur et difficulté des textes, types d’activités, nombre d’évaluations formatives, modalités d’encadrement, examen final en salle, pondération des notes, etc.); ont intégré le contenu dans le DECclic et ont suivi le projet. Au fil de l’expérimentation, la cohérence du cours s’est améliorée, la gestion des contenus comme du cheminement des élèves s’est raffinée et on réalise de plus en plus que l’utilisation du DECclic allège notre tâche.
L’impact est évident au niveau professionnel puisque nous avons amélioré notre programme grâce à la création d’un cours multidisciplinaire et au resserrement des champs d’études et nous sommes parvenus à une meilleure cohésion d’équipe autour de ce projet commun. Par surcroît, les rencontres bimensuelles durant tout le projet ont amélioré nos relations interpersonnelles. Tout au long de ces rencontres, on a appris à mieux cohabiter tout en maîtrisant davantage le champs disciplinaire des autres profs du programme.
Est-il possible de voir quelques extraits du cours?
La Politique du collège ne permet pas de donner accès au cours. Toutefois, je suis disponible pour aller faire des démonstrations du cours dans les collèges : manon.pilon@bdeb.qc.ca.
Pour ne pas vous laisser sur votre appétit, je peux toutefois vous donner un aperçu du cheminement d’un élève dans le cours :
- Au début de la session, une première rencontre en classe permet aux élèves de comprendre les objectifs et la structure du cours et de s’initier au fonctionnement du DECclic.
- Pour le reste du cours, les élèves travaillent à leur rythme à distance et doivent respecter certaines dates d’échéance pour la remise de travaux. Sept différents modules qui abordent la thématique en fonction de disciplines différentes sont présentés dans le DECclic et deux semaines sont requises pour la réalisation de chacun des modules. Chacun d’eux se conclut par la réalisation d’un exercice d’autoévaluation et un bref travail pratique.Durant la réalisation des exercices relatifs à chacun des modules, ils peuvent contacter le professeur responsable de la discipline à l’étude, par courriel, pour avoir des informations supplémentaires ou obtenir des réponses à des questions.
- Tout au long du cours, un suivi serré du cheminement de chaque élève est effectué par sa tutrice ou son tuteur. Ce dernier fait des relances, s’assure que les travaux sont remis, vérifie les difficultés, répond aux questions lorsqu’elles concernent sa discipline, etc. Il arrive que des rencontres en présence soient requises pour faire le point et l’élève est invité à contacter son tuteur ou sa tutrice lorsque cela est nécessaire.
- Le cours se termine par un examen final en présence au collège.
Et les élèves dans tout cela?
De manière générale, on peut dire que les élèves apprécient le cours et plus particulièrement le fait de progresser à leur rythme. Il arrive quelquefois que certains regrettent de ne pas rencontrer leur enseignante ou enseignant en personne à chacun des cours.
En plus de l’individualisation et de l’utilisation du mode virtuel, c’est au niveau de l’encadrement que la différence avec des cours traditionnels se fait sentir. Très souvent, les élèves sont impressionnés de savoir qu’ils sont pistés en ce sens que le tuteur ou la tutrice est au courant de toutes les activités qu’ils ont réalisées dans le cours. Ils ne peuvent plus se cacher s’ils n’ont pas regardé le module ou fait les exercices puisque le DECclic prend note de chacune de leur visite sur le site.
Quelles sont les prochaines étapes?
Pour l’instant, nous raffinons les contenus présentés dans le DECclic et modifions, à chaque session, les évaluations formatives et sommatives. Pour le futur, il est possible qu’une autre thématique ou que d’autres formules pédagogiques soient développées. Nous prévoyons nous pencher sur la question à la session d’automne 2005.
Quels sont les conseils à transmettre à d’autres collègues qui voudraient intégrer les TIC dans leur pratique pédagogique?
Il est certain que chaque équipe enseignante est différente, mais je pense qu’il faut minimalement :
- un consensus d’équipe sur le projet;
- une maîtrise minimale de DECclic;
- un support technique adéquat pour les professeurs et les élèves;
- une très bonne identification du contenu qui sera intégré dans la plateforme DECclic;
- la volonté de réajuster le contenu en fonction de l’expérience.
En terminant, je dirais qu’un programme gagne à offrir une diversité de formules pédagogiques et qu’il ne faut pas vouloir mettre tous les cours du programme dans le DECclic. Dans notre cas, le choix d’intégrer les technologies dans un cours multidisciplinaire à la fin du programme a été judicieux.
Merci Manon d’avoir partagé ton expérience.