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15 avril 2020

La rétroaction multitype – Un rapport de recherche PAREA par Catherine Bélec et Éric Richard

Ce texte a initialement été publié par Profweb sous licence CC BY-NC-ND 4.0 International, avant la création d’Éductive.

Catherine Bélec et Éric Richard ont publié en décembre 2019 un rapport de recherche PAREA intitulé La rétroaction multitype. Dans le cadre de cette recherche, 14 enseignants du collégial ont intégré la rétroaction numérique multitype à leur pratique. Je vous présente quelques grandes lignes du rapport.

Catherine Bélec a déjà publié en 2016 un article dans Pédagogie collégiale au sujet de sa propre expérience de rétroaction multitype: j’en avais fait un compte-rendu dans Profweb.

Qu’est signifie « rétroaction multitype »?

La rétroaction multitype, c’est combiner, grâce au numérique, plusieurs types de rétroaction sur le travail d’un étudiant:

  • écrite
  • audio
  • ressource en ligne
  • image
  • etc.

La rétroaction multitype, c’est ce que fait, par exemple, l’enseignant Richaud Aubé. Il en témoigne dans son récit « La correction numérique de travaux au format PDF pour des rétroactions claires et accessibles ». Si Richard Aubé se montre très satisfait de la correction numérique, certains des enseignants suivis par Catherine Bélec et Éric Richard dans le cadre de leur recherche ont eu plus de difficulté à intégrer la rétroaction multitype à leur pratique.

Le temps à investir

C’est en partie parce que, les premières fois qu’un enseignant habitué à la correction papier expérimente les rétroactions numériques multitypes, ça prend (dans la plupart des cas des enseignants participants à la recherche de Catherine Bélec et Éric Richard) plus de temps que la correction sur papier. Pour que le jeu en vaille la chandelle, il faut que l’enseignant croie au potentiel formatif de ses rétroactions. Or, Catherine Bélec et Éric Richard écrivent que plusieurs enseignants ne semblent pas considérer les rétroactions comme une manière d’enseigner. Dans ce contexte, en effet, un investissement de temps est difficile à justifier.

[S]i la rétroaction multitype est uniquement considérée comme un nouvel outil permettant de transférer les rétroactions, l’investissement de temps et d’efforts qu’aura à faire l’enseignant afin d’apprivoiser l’outil lui-même n’en vaut probablement pas la peine. Par contre, si l’enseignant considère la rétroaction multitype comme une nouvelle méthode pédagogique […], il devient alors envisageable de penser que la rétroaction multitype génèrera un développement professionnel pour l’enseignant et des retombées positives pour l’apprentissage des étudiants.

Catherine Bélec et Éric Richard, La rétroaction multitype

Pour des conseils sur la nature des rétroactions efficaces, lisez l’article « Comment donner une rétroaction efficace aux étudiants » écrit par Isabelle Sénécal dans Profweb.

S’assurer que les étudiants aient accès aux rétroactions

Catherine Bélec et Éric Richard ont noté qu’il était important de s’assurer que les étudiants prennent le temps de consulter les rétroactions qu’on leur fournit, par exemple en s’assurant qu’ils aient accès à un ordinateur lors de la remise des travaux.

Les cellulaires ne font pas toujours l’affaire: l’écoute de clips audio insérés à un document PDF ne fonctionne généralement pas sur un cellulaire. De plus, pour que les étudiants puissent consulter sur leur téléphone les rétroactions écrites que vous inscrivez dans leurs PDF, vous devez les écrire dans des boîtes de textes qui se superposent au contenu du fichier, et non les cacher dans des notes.

Un commentaire dans une boîte de texte (à gauche) et un commentaire caché dans une note (à droite)

Catherine Bélec et Éric Richard font l’hypothèse que, lorsque les étudiants sentent que leur enseignant accorde de l’importance au fait qu’ils consultent les rétroactions, ils accordent eux-mêmes plus de valeur à ces rétroactions.

Recommandations

Catherine Bélec et Éric Richard ont formulé des recommandations sur les conditions gagnantes pour intégrer la rétroaction multitype à sa pratique:

  • choisir un travail ayant un fort potentiel de transfert (un travail à propos duquel les rétroactions pourront donner lieu à des apprentissages qui seront évalués dans un travail ou un examen subséquent)
  • choisir un travail que les étudiants remettent de façon numérique (pour nous éviter d’avoir à les numériser nous-mêmes)
  • choisir un travail dans le cadre d’une classe peu nombreuse ou un travail d’équipe
  • choisir un cours que l’enseignant a déjà donné et où il maitrise sa matière
  • utiliser le multitype dans un contexte d’apprentissage où les étudiants peuvent avoir accès en classe à des ordinateurs (laboratoire, classe hybride, classe active comportant un chariot de portables, etc.).

[Les enseignants] peuvent utiliser le multitype de manière à générer des
retombées positives chez les étudiants, et ce, même en contexte de changement de pratique,
dans la mesure où ils mettent en oeuvre la méthode adéquatement : il importe

  • qu’ils parviennent à valider l’accès aux rétroactions
  • qu’ils formulent des commentaires prospectifs axés sur des stratégies procédurales constructives
  • qu’ils adoptent une approche pédagogique de l’erreur…
  • et qu’ils prennent plaisir à expérimenter le multitype.

Catherine Bélec et Éric Richard, La rétroaction multitype

En me basant sur mon expérience personnelle et des témoignages anecdotiques recueillis auprès de pairs de façon non scientifique, je me permets un mot d’encouragement. La première fois qu’on essaie quelque chose de nouveau est rarement celle où on est le plus efficace. Vous vous ferez vite la main. Mieux: la correction numérique peut devenir plus rapide que la correction traditionnelle sur papier, tout en étant plus riche pour les étudiants. Comment?

Vidéo montrant comment définir un code de remplacement automatique dans Word. On choisit une séquence de caractères qui sera automatiquement remplacée par une autre quand elle sera tapée dans n’importe quel document Word. Ici, j’ai choisi que « \puissance » soit remplacée par une phrase énonçant une règle d’écriture de l’incertitude sur les mesures. Dans le travail d’un autre étudiant, je n’aurai qu’à taper « \puissance » pour que la même phrase complète réapparaisse, que ce soit dans le corps du texte ou dans un commentaire. C’est une façon de fournir presque sans effort une rétroaction riche et claire aux étudiants.

Pour d’autres astuces, lisez l’article « Optimiser son temps de correction tout en rendant sa rétroaction efficace », écrit par Anne-Marie Lafortune dans Profweb.

L’importance d’y prendre plaisir

Catherine Bélec et Éric Richard écrivent que, plus les enseignants apprécieront leurs premières expérimentations de rétroaction multitype, plus ils arriveront à produire des rétroactions dont le contenu satisfera les étudiants. C’est à garder en tête! Si vos premiers essais ne se passent pas à votre goût, ne vous acharnez pas seuls en vain: consultez le répondant TIC de votre collège pour embarquer sur la bonne voie. Vos étudiants y gagneront (et en particulier, peut-être, les plus faibles, d’après les résultats de Catherine Bélec et Éric Richard).

À propos de l'auteure

Catherine Rhéaume

Catherine Rhéaume est éditrice et rédactrice pour Éductive (auparavant Profweb) depuis 2013. Elle est enseignante de physique au Cégep Limoilou. Elle est également auteure de différents cahiers d’apprentissage pour la physique et pour la science et la technologie au secondaire. Son travail pour Éductive l’amène tout naturellement à s’intéresser à la pédagogie numérique et à l’innovation pédagogique.

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2 Commentaires
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Luc Mahieu
Luc Mahieu
16 juin 2020 9h33

Bonjour, merci beaucoup pour cette synthèse éclairante et inspirante. Pour information, le site https://www.ralentirtravaux.com/w/index.php?title=Commentaires_et_Appr%C3%A9ciations propose une banque collaborative de commentaires pour des travaux scolaires (plutôt orientée vers le niveau secondaire français).

Catherine Rhéaume
Catherine Rhéaume
16 juin 2020 12h14

Très utile! Merci pour ce partage!