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15 janvier 2020

Une approche-programme pour la prise de notes à l’ère du numérique

Ce texte a initialement été publié par Profweb sous licence CC BY-NC-ND 4.0 International, avant la création d’Éductive.

La formation des futurs graphistes oblige la connaissance, la maîtrise et l’utilisation constante de logiciels et de technologies émergentes sur le marché du travail. Cela trouve inévitablement écho dans les salles de classe. En tant qu’enseignants de graphisme au Cégep de Sainte-Foy, dans un programme portable, ma collègue Anne-Claire Delisle et moi avons conçu une manière flexible pour nos étudiants de prendre des notes sur les ordinateurs qu’ils ont tous en classe. Nous voulions que la prise de notes soit à l’image de chaque étudiant. Le fait que l’étudiant produise ses propres notes l’oblige à s’engager dans ses études et à mieux intégrer la matière.

Nous avions observé dans nos cours de graphisme que les étudiants oubliaient souvent, une fois un projet complété, comment réaliser des tâches simples dans les logiciels que nous leur avions enseignés à utiliser. C’est comme si chaque projet était fait en vase clos et que les apprentissages n’étaient pas transférables. Les employeurs de nos finissants nous avaient également signalé que les jeunes travailleurs ne prenaient pas suffisamment de notes, ce qui leur nuisait et les empêchait parfois de compléter des projets.

Les visées de notre projet

Nous sommes allés rencontrer les futurs employeurs de nos étudiants pour connaître la réalité et les besoins du marché du travail.

Notre projet de prise de notes a pris son envol lorsque nous avons obtenu une libération d’enseignement pour le mener à bien.

Ce projet de prise de notes numériques devait répondre à plusieurs objectifs :

  • Ne pas alourdir la tâche des enseignants
  • Rendre les étudiants actifs et responsables
  • Utiliser des outils transférables sur le marché du travail
  • Développer les réflexes de prise de notes
  • Créer une stratégie flexible de prise de notes

Après avoir consulté la littérature scientifique sur la prise de notes, 3 conclusions générales sont ressorties :

  • La prise de notes est importante parce qu’elle permet à l’étudiant d’intégrer les notions. Si un enseignant fournit des notes toutes faites, l’étudiant intègre moins les informations que s’il a fait l’effort de les analyser avant de les noter lui-même.
  • La prise de notes manuscrites oblige un effort supplémentaire du cerveau. La rétention de l’information semble meilleure, car un travail de synthèse est fait par l’étudiant au moment d’écrire l’information.
  • L’ordinateur accélère la prise de notes, mais il arrive parfois que les notes ne soient qu’un copier-coller des paroles de l’enseignant; le travail de synthèse n’est pas fait.

Ces conclusions ont consolidé notre première impression qu’il fallait engager nos étudiants dans le processus de prise de notes pour qu’ils intègrent réellement les apprentissages. Nous ne voulions plus que les étudiants soient passifs et attendent les notes de cours créées par l’enseignant, mais qu’ils soient engagés dans leurs études et développent une méthodologie de travail qu’ils utiliseront tant à l’école qu’au travail.

Notre projet s’est donc inscrit dans une approche-programme : notre but étant que tous les enseignants de graphisme aient la même approche face à la prise de notes pour que les étudiants intègrent vraiment la méthode.

L’infonuagique comme cahier de notes virtuel

Nous avons opté pour Google Drive Professionnel, offert par le cégep, car c’est l’outil le plus utilisé sur le marché du travail et c’était une volonté des employeurs que nos finissants maîtrisent l’infonuagique. De plus, Google Drive Professionnel permet un stockage infini et est accessible partout.

Dans ce projet, nous avons proposé une variété de types de notes. Ainsi, les étudiants ont eu la liberté d’adapter leur méthode de travail à leur réalité. Ils peuvent tester et trouver la façon qui leur convient le mieux de prendre des notes.

Les notes de cours ont pris différentes formes :

  • notes au tableau photographiées par les étudiants
  • vidéos
  • photos inspirantes
  • notes manuscrites prises dans un cahier puis photographiées pour avoir une copie numérique
  • fichiers PDF
  • pages de sites web
  • vidéos YouTube
  • captures d’écran
  • etc.

Les outils valorisés pour la prise de notes sont diversifiés et intègrent tant l’ordinateur, le cellulaire que le traditionnel cahier de notes.

D’ailleurs, chaque étudiant devait se procurer un cahier de notes ainsi qu’une pochette pour qu’il ait un endroit où consigner la matière de ses cours de graphisme. Les étudiants devaient s’approprier leur cahier en le décorant et en le personnalisant.

De plus, tant les étudiants que les enseignants ont été encouragés à adopter le même code pour l’écriture des notes :

  • Code de notes
    • titre souligné
    • liste à puces
    • étapes en chiffre
    • abréviations uniformisées
  • Code de couleurs
    • Code de couleur selon la compétence développée
    • repères visuels dans le Google Drive

Exemples du code de couleurs utilisé, d’un plan de cours classé par couleur et d’un Google Drive d’étudiant avec les différents projets associés à une couleur. Source : Mathieu Plasse

Un nouveau découpage des cours

Dans le DEC en graphisme, l’enseignement s’appuie sur la réalisation de projets qui s’inspirent de devis et de commandes de vrais clients. Dans le cadre de notre stratégie de prise de notes, pour rendre l’enseignement plus explicite et faciliter l’acquisition de la matière chez les étudiants, nous avons proposé que les cours soient planifiés en fonction des différents projets réalisés en classe plutôt que de diviser la matière par semaine. Ce découpage n’était pas naturel pour les étudiants, qui oubliaient souvent à quel moment de la session ils avaient appris l’utilisation d’un logiciel ou diverses notions théoriques. En adoptant une planification par projet, il est plus facile pour les étudiants de conserver et de classer leurs notes.

L’implantation du projet en classe

L’implantation du projet s’est fait à l’automne 2018. Les enseignants du programme ont dû, entre autres :

  • découper leurs cours par projet
  • ajouter le code de couleur à leur plan de cours
  • apprivoiser le code pour les notes
  • adopter Google Drive

À la surprise de plusieurs enseignants, cette nouvelle manière d’écrire les notes de cours a allégé leur tâche d’enseignement. En effet, le temps qu’ils passaient à préparer des notes de cours a grandement diminué.

Il a fallu que les enseignants prennent du temps en début de session pour aider les étudiants à se familiariser avec des logiciels de capture d’écran. La capture d’écran est intéressante lorsque vient le temps de créer un tutoriel personnalisé rappelant les différentes étapes à suivre dans les logiciels. L’enseignant peut indiquer les moments importants où réaliser un tel tutoriel s’avère pertinent.

Il était impératif que tous les enseignants du programme travaillent avec Google Drive pour créer une cohérence et une continuité entre les cours et, surtout, pour permettre aux étudiants de travailler avec une seule plateforme. Certains étudiants ont eu besoin d’un temps d’adaptation avec l’infonuagique. Les étudiants ont grandement apprécié avoir un espace où stocker toutes les connaissances qu’ils ont recueillies au fil de leurs études et qu’ils peuvent conserver une fois leur programme complété.

L’utilisation de Google Drive a simplifié et facilité le travail collaboratif. Ce projet a permis de créer une culture de prise de notes au sein du programme. Maintenant, les étudiants sont beaucoup plus proactifs et s’approprient l’information et l’adaptent à leur convenance. D’ailleurs, l’un des projets réalisés par les étudiants intègre à la fois la matière vue en classe et leur nouvelle méthode de prise de notes. Les étudiants ont dû créer un cahier de notes imprimé détaillant le processus de création dudit cahier.

Animation créée à partir de projets d’étudiants. Source : Mathieu Plasse

En fin de compte, cette nouvelle méthode de prise de notes modifie les habitudes des enseignants et des étudiants. Pour que les résultats soient au rendez-vous, l’approche-programme est importante. La flexibilité que nous proposons dans la prise de notes rend notre enseignement plus accessible à tous les étudiants.

À propos de l'auteur

Mathieu Plasse

Il est professeur en graphisme au Cégep de Sainte-Foy depuis 2015. En 2002, il complétait un baccalauréat en enseignement à l’Université Laval et, en 2006, il terminait son baccalauréat en graphisme à L’UQAM. Passionné de nouvelles technologies et toujours à l’affût des innovations dans le domaine, il travaille à intégrer les nouvelles possibilités médiatiques au graphisme et à l’enseignement.

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Nicole PERREAULT
Nicole PERREAULT
20 janvier 2020 16h24

Bonjour, l’activité dont il est question dans cet intéressant récit a été présentée à la rencontre REPTIC de novembre 2019 et elle a reçu un accueil des plus chaleureux. Développer une compétence visant la prise de notes active contribue à responsabiliser les étudiants, que ce soit dans le cadre de leurs études ou dans leur futur milieu de travail. Cette activité sera illustrée dans le cadre d’un projet de capsules vidéo sur l’utilisation du Profil TIC des étudiants du collégial dans les programmes d’études. Bravo.

Annie Pineault
Annie Pineault
21 janvier 2020 19h13

Bravo Mathieu, ton projet est inspirant!